Avec près de 30 % des effectifs selon l’Insee, l’industrie est un secteur d’activité dans lequel l’emploi féminin est à la hausse. Une tendance en forte augmentation ces 20 dernières années mais qui reste à relativiser. En effet, non seulement les femmes restent largement minoritaires, notamment dans les postes à responsabilité, mais elles se concentrent essentiellement dans 3 sous-secteurs industriels. Alors, à quelques jours de la Semaine de l’Industrie, quelle est véritablement la place des femmes dans l’industrie ?
À l‘image des ingénieures, les femmes ont encore du mal à trouver leur place dans le secteur industriel bien que la situation évolue positivement depuis ces dernières années. Aujourd’hui encore, elles se répartissent essentiellement dans trois sous-secteurs industriels principaux :
- Le textile-habillement où elles sont majoritaires avec 61 %
- L’industrie pharmaceutique avec 54 % des effectifs
- L’agroalimentaire où elles occupent 43% des postes
En 2013, l’aéronautique ne comptait encore que 20 % de femmes dans ses effectifs selon le GIFAS (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales).
Des stéréotypes persistants dans l’industrie
En 2015, KPMG réalisait une étude sur la place des dirigeantes en France mettant en avant la lente ascension des femmes aux postes de direction : seules 14 % en occupaient, soit 1,2 point en plus par rapport à 2003.
Toutefois, la bonne nouvelle venait des évolutions notables de certains secteurs « traditionnellement » masculins tels que l’énergie avec + 130 % de femmes dirigeantes en 10 ans, les industries agroalimentaires avec + 23,6 % et l’immobilier avec une hausse de 21,5 %.
Le saviez-vous ?
Récemment encore dans l’agroalimentaire, les femmes travaillaient majoritairement à la fabrication de produits pour enfants, de bonbons, de chocolat et les hommes s’occupaient de la transformation de la viande et de l’alcool !
Source : Insee, 2012
Et les stéréotypes apparaissent dès le plus jeune âge comme en témoigne l’enquête menée par l’association Elles bougent en 2016 sur « Les femmes, l’industrie, la technologie et l’innovation » auprès de 1 000 femmes ingénieures, 500 étudiantes en filière scientifique et technologique, et 500 collégiennes et lycéennes. Il apparaît ainsi qu’au collège, les filles s’intéressent en priorité aux métiers du secteur médical et paramédical, du luxe, et des médias. Les garçons s’intéressent à l’aéronautique, au spatial, à l’automobile et à la robotique.
Autre fait marquant : il apparaît également que le parcours est plus long pour une femme dans le BTP et dans l’industrie alors qu’il sera bien plus rapide dans le commerce et les services ! Les stéréotypes ont la vie dure et la parité est encore loin d’être de mise…
Un secteur encore mal identifié
… Mais dans l’industrie aussi, les mentalités évoluent. Chez les industriels d’une part, mais aussi chez les jeunes filles, d’autre part. Car oui, c’est bien sur les bancs de l’école que les inégalités se creusent toujours selon l’enquête de l’association Elles bougent.
Au collège et au lycée, les filles autant que les garçons se déclarent majoritairement prêtes à faire des études scientifiques. Alors pourquoi un tel décalage ensuite ? Principalement par manque d’informations pour 70 % d’entre eux. Autre point important : les jeunes ont une idée plus précise de ce qu’est le numérique (65 %) que l’industrie (55 %).
Un manque d’information et de communication à tous les niveaux qui pousse les jeunes femmes à s’orienter vers d’autres carrières, d’autant qu’elles sont souvent peu mises en valeur par les entreprises du secteur elles-mêmes ! La valorisation des role models devient alors plus que nécessaire pour encourager les jeunes diplômées. D’autant que les effectifs féminins dans les écoles d’ingénieurs tendent eux aussi à augmenter s’approchant désormais des 30 % (toutes filières confondues).
La Semaine de l’Industrie
C’est donc dès le plus jeune âge qu’il faut intervenir pour casser cette image « masculine » du secteur et attirer les femmes dans l’industrie. Elles sont ainsi 38 % pour lesquelles la crainte du machisme et du sexisme constituerait un frein pour poursuivre une carrière dans une entreprise industrielle (enquête Elles bougent, Donne ta vision de l’industrie, 2013).
Une réalité relayée désormais au plus haut niveau de l’État. Et les actions commencent à porter leurs fruits : seules 13 % des jeunes filles pensent aujourd’hui encore que leur intégration en entreprise se passera de la même façon qu’il y a 10 ans. Elles sont mêmes de plus en plus nombreuses à penser qu’être une femme dans l’industrie peut être un atout ou un point fort pour l’entreprise : c’est le cas de 32 % des collégiennes, 41 % des lycéennes et 43 % des étudiantes post bac.
La Semaine de l’Industrie
Fort de ce constat, l’État a ainsi lancé en 2011 la Semaine de l’Industrie, une manifestation annuelle d’ampleur nationale pour contribue à changer le regard du public et plus particulièrement des jeunes sur l’Industrie grâce à des événements organisés en France métropolitaine et DOM-TOM. Ne manquez pas l’édition 2018 qui se déroulera du 26 mars au 1er avril 2018 !
Pour en savoir plus : https://www.entreprises.gouv.fr/semaine-industrie
Quelle est la place des femmes dans l’industrie ?
C’est pourquoi l’initiative de l’UIMM Picardie, principal organisme fédérateur des entreprises industrielles régionales à l’occasion de la Journée Internationale des droits des Femmes le 8 mars 2018, est à saluer.
L’organisme a en effet ainsi mis en valeur 3 femmes engagées dans le milieu de l’industrie en tant que dirigeant d’entreprise, étudiante en apprentissage ou ingénieure maintenance. Qui sont-elles ? Voici leurs portraits.
Pascale SEBILLE, Dirigeante de l’entreprise AUTEXIER à Chauny
Présidente du MEDEF Aisne et Présidente des Conseillers du Commerce Extérieur de la France en Picardie (CCEF), Pascale Sebille est aussi à la tête de l’entreprise AUTEXIER, fabricant de vannes en bronze, CuproAluminium, CuproNickel, depuis 1995. Ayant toujours évolué dans le secteur industriel, elle a pu en voir les mutations.
Très marquée d’une empreinte masculine où il est difficile d’y faire sa place, l’Industrie est pourtant un secteur où la place des femmes prend une dimension de plus en plus importante.
“Il faut raisonner compétences et non faire des comparatifs hommes – femmes. Être une femme n’est pas un handicap dans un milieu essentiellement masculin. Au contraire, c’est une force qu’il faut savoir utiliser à bon escient. C’est aujourd’hui une réelle fierté d’être à la tête d’une société industrielle en plein développement grâce à son CA à l’export, avec des collaborateurs impliqués et la volonté de produire toujours plus en France. Ce sont les challenges de tous les jours”.
« J’ai eu une image positive du milieu industriel dès mes débuts, et c’est encore plus le cas aujourd’hui. Je suis issue d’une famille qui exerçait dans la fabrication de matériels de travaux publics. Avant de prendre la direction d’AUTEXIER, j’étais notamment en poste au sein de l’industrie automobile chez Mercedes Benz.”
Ludivine PEZERIL, élève apprentie en 2e année de BTS Conception de Processus de Réalisation de Produits option Sérielle
Apprentie chez SUMA à Albert, société de fabrication en mécanique et outillage de précision, Ludivine Pezeril, travaille sur la fabrication de modèles 3D. « J’ai pour objectif de générer des programmes pour l’usinage des pièces, mais aussi de veiller au respect des normes » témoigne-t-elle.
Après des études supérieures dans le domaine des mathématiques, elle a découvert l’industrie via le centre de formation professionnelle Proméo.
Poussée par ses parents à suivre cette formation et cette voie, Ludivine Pezeril ne regrette pas son choix. « Tout se passe bien. Etre une femme dans un milieu industriel n’est pas plus difficile qu’ailleurs. Il n’est pas toujours facile d’apporter sa touche personnelle mais il faut trouver des astuces pour se faire entendre et s’imposer en participant à donner des idées. Le maître mot c’est oser. »
À la suite de son BTS, Ludivine souhaite poursuivre une formation en licence voire en master, toujours en alternance dans son entreprise afin de continuer à acquérir de nouvelles compétences.
« J’ai très vite été attirée par ce BTS en apprentissage. Je connaissais déjà SUMA pour y avoir travaillé en job d’été. L’alternance me permet d’allier la théorique et la pratique, mais aussi de voir mes missions évoluer. Je suis passée d’opératrice à un poste ou j’ai la responsabilité du contrôle des pièces. »
Honorine DEMAZURE, Ingénieure Maintenance chez Montupet
Ingénieure Maintenance au sein de l’entreprise Montupet, spécialisée dans la conception et la production de pièces de fonderie usinées pour l’automobile, Honorine Demazure est la seule femme dans un service de 70 personnes. À la tête d’une équipe de 7 personnes, elle est pleinement épanouie dans son travail quotidien.
Issue d’une famille qui n’était pas forcément favorable à une carrière professionnelle dans le secteur industriel, Honorine Demazure s’est donné les moyens d’y faire sa place. « Mon entourage me disait que l’industrie n’était pas un milieu fait pour les femmes, et que ce n’était pas la voie à suivre. Aujourd’hui, même si mon métier me prend beaucoup de temps, ils ont tout à fait intégré mon souhait de poursuivre ce chemin professionnel. Les métiers de l’industrie ne sont pas faciles mais deviennent simples quand on va de l’avant ».
Si elle avait un conseil à donner aux femmes qui souhaiteraient se lancer dans le secteur industriel ce serait de « se lancer, oser ». Les opportunités offertes sont multiples et les entreprises sont de plus en plus en recherche de mixité et de nouveaux profils.
« Les débuts ont été un peu difficiles car il faut faire ses preuves. Mais c’est le cas de chaque personne qui arrive dans une entreprise ou dans un nouveau service. Il faut aussi avoir le sens de la communication, et je pense que les femmes ont plus de facilités pour communiquer et ainsi s’intégrer rapidement ».